Le 17 juin, le département des Chaires ESCP, l’option de spécialisation « The Green CFO – finance durable » et Infranity ont organisé une table ronde exceptionnelle réunissant quatre expertes en finance durable.
Un panel 100 % féminin pour leurs contributions éclairantes :
- Karen Degouve – Natixis - Groupe BPCE
- Jeanne Michon-Savarit – Infranity
- Lucie Pinson – Reclaim Finance
- Louise Swistek – Lita.co
La table ronde sur la finance durable animée par Christophe Thibierge - Professeur de Finance à ESCP Business School a réuni des expertes du domaine pour discuter des défis et opportunités dans un contexte mondial marqué par des tensions entre les approches américaines, chinoises et européennes. Les discussions ont mis en avant des sujets clés tels que les critères ESG, les risques extra-financiers, la régulation, le rôle des particuliers et les obstacles liés au greenwashing.
Points clés de cette table ronde :
- La finance durable se trouve à la croisée des défis environnementaux et économiques. Pour tenir ses promesses, elle doit surmonter des obstacles tels que la complexité réglementaire et le manque de données fiables afin de devenir un levier puissant pour une transition vers une économie plus verte et plus équitable.
- Le développement durable est une question politique, tandis que l’énergie est un enjeu géopolitique.
- Le rapport 2025 Banking On Climate Chaos (BOCC), publié par des ONG (dont @Reclaim Finance), offre une analyse détaillée des liens entre les banques et les énergies fossiles, mettant en lumière des faits clés.
- Les risques non financiers, tels que les impacts environnementaux ou réputationnels, nécessitent des méthodologies spécifiques pour être anticipés et gérés efficacement.
Les défis et opportunités mondiaux
Le contexte global
Les États-Unis ont récemment ralenti leurs investissements dans les projets durables, politisant le concept d’ESG. La Chine, bien qu’engagée dans des projets massifs d’énergies renouvelables, reste fortement dépendante des énergies fossiles. L’Europe, avec ses cadres réglementaires comme la taxonomie verte et la CSRD, tente de se positionner comme une référence, mais se heurte à des critiques sur la complexité de ses systèmes législatifs.
Les définitions de la finance durable

- Pour Christophe Thibierge, la finance durable est liée aux objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU et à l’intégration des critères extra-financiers.
- Jeanne Michon-Savary distingue finance et investissement durable en mettant en avant la maîtrise des risques.
- Lucie Pinson critique le terme « finance durable », soulignant ses limites dans la finance dominante actuelle.
- Louise Swistek estime que la finance durable couvre un large éventail de pratiques, parfois moins durables.
- Karen Degouve explique que la finance durable inclut des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) pour analyser les investissements, financements et assurances afin de dépasser les seules considérations financières.
Critères ESG et défis réglementaires
Les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) sont cruciaux pour analyser les activités économiques. Cependant, les réglementations européennes, bien qu’ambitieuses, souffrent d’une complexité excessive qui entrave leur efficacité, notamment pour les PME. La double matérialité, une spécificité européenne, est perçue comme un atout, bien qu’elle reste difficile à mettre en œuvre.
Les obstacles et perspectives
- La fragmentation due au backlash ESG est notable, notamment aux États-Unis.
- Les besoins en infrastructures renouvelables augmentent en Europe et en Asie.
- Les régulateurs doivent jouer un rôle clé pour accompagner les transitions tout en évitant la surcharge administrative.
Rôle des particuliers et financement participatif
Aujourd’hui en France le potentiel des épargnants est important pour orienter les investissements vers des projets responsables. Le crowdfunding a connu une croissance significative en Europe, avec 1,7 milliard d’euros levés en France en 2024. Cependant, les options durables restent limitées pour les investisseurs individuels.
La dépendance aux énergies fossiles
Malgré l’essor des énergies renouvelables, les énergies fossiles représentent encore 80 % des ressources énergétiques mondiales. Leur faible coût et leur facilité d’utilisation en font une option dominante, bien que la transition vers des sources plus propres soit essentielle pour répondre aux défis climatiques.
Greenwashing et transparence
Le greenwashing, intentionnel ou non, reste un obstacle majeur. Les expertes ont souligné l'importance de la transparence et de la vérification des plans de transition des entreprises. Les superviseurs et autorités de marché doivent être dotés de moyens suffisants pour garantir l'alignement des pratiques financières avec les objectifs climatiques.
La finance durable est à un tournant critique. Si elle veut tenir ses promesses, elle doit surmonter des défis réglementaires complexes, intégrer pleinement les critères extra-financiers et mobiliser tant les acteurs institutionnels que les particuliers. Elle reste un levier essentiel pour bâtir une économie plus verte et équitable.
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