Loris Guery, Yves Moulin, Marc Salesina et Anne Stévenot ont mené pour la Chaire DSCE une recherche qui s’intéresse à la gouvernance des entreprises et aux variations observées dans les pratiques de travail et d’emploi ainsi que dans les relations professionnelles en fonction de la nature de leur actionnariat.

« Ce projet de recherche s’inscrit dans la volonté d’apporter un éclairage concernant des enjeux de gestion essentiels, en particulier la manière dont le comportement des firmes peut être modulé par l’identité et les objectifs de leurs propriétaires », expliquent les professeurs à l’Université de Lorraine et membres du CEREFIGE (Centre Européen de Recherche en Economie Financière et Gestion des Entreprises). Et de constater que quel que soit le champ privilégié, la manière dont la nature de l’actionnariat est susceptible d’affecter la relation d’emploi et les relations professionnelles reste peu explorée.
« Toutes les formes de gouvernance ne conduisent pas aux mêmes comportements ni aux mêmes résultats, et une même forme de gouvernance mise en œuvre dans des contextes historiques, sociaux, institutionnels ou légaux différents peut elle aussi conduire à des effets différents », soulignent-ils dans le policy paper qu’ils ont produit pour la Chaire Dialogue Social et Compétitivité des Entreprises (DSCE).

Loris Guery, Yves Moulin, Marc Salesina et Anne Stévenot ont donc croisé les apports de trois champs de recherche - la littérature consacrée à la gouvernance, la gestion des ressources humaines et les relations industrielles –, mené des analyses économétriques sur les données de l’enquête REPONSE (Relations professionnelles et négociations d’entreprises) réalisée par la DARES (Direction de l’Animation de la Recherche des Études et Statistiques du ministère du Travail) et réalisé des entretiens avec des acteurs directement concernés : représentants d’investisseurs, de syndicats de salariés ainsi que de cabinets spécialisés dans le conseil aux instances représentatives du personnel et aux organisations syndicales.
Les résultats issus de leur analyse quantitative sont riches et mettent en évidence, de manière générale, une incidence des formes d’actionnariat à la fois sur les pratiques de travail et d’emploi ainsi que sur les relations professionnelles, avec des spécificités fortes qui ressortent pour les entreprises familiales d’une part, pour les entreprises financées par capital-investissement de l’autre. Les résultats de l’analyse qualitative mettent en exergue la dimension éminemment stratégique de ces questionnements pour certains acteurs (repreneurs et dirigeants) et, dans le même temps, la focalisation d’autres acteurs (en particulier les représentants des salariés) sur des éléments essentiellement pragmatiques.

Si leur étude montre une grande cohérence avec la littérature existante, en particulier sur la thématique de l’influence du type de gouvernance sur le comportement des firmes (le type de gouvernance compte pour expliquer les différences entre les firmes), ils invitent également à poursuivre les efforts engagés ailleurs concernant l’identification des déterminants et qui expliquent la variation de l’influence sur le comportement de l’entreprise selon le type de gouvernance. « Nos résultats apportent également des éclairages nouveaux sur les relations professionnelles dans le contexte français, estiment les auteurs. En effet, il n’existe pas à notre connaissance d’étude faisant explicitement usage de mesures de l’intensité et du développement des pratiques d’expression des salariés dans le contexte français. À ce titre, les résultats produits permettent d’enrichir les connaissances en matière d’analyses comparatives des systèmes nationaux de relations professionnelles ».

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